LE GREFFIER DE TRIBUNAL DE COMMERCE

Le statut du greffier de tribunal de commerce est prévu à l’article L. 741-1 du code de commerce : « Les greffiers des tribunaux de commerce sont des officiers publics et ministériels ».

 

La profession de greffier des tribunaux de commerce est représentée auprès des pouvoirs publics par le Conseil National des Greffiers des Tribunaux de

Commerce (ci-après CNGTC), doté de la personnalité morale et chargé d’assurer la défense de ses intérêts collectifs (art. L. 741-2 du code de commerce).

 

Le CNGTC, composé de membres élus par les greffiers des tribunaux de commerce (article R. 741-10 du code de commerce), a donc vocation à représenter la profession auprès des pouvoirs publics, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession, proposer la liste des greffes à inspecter pour l’année dans le cadre des inspections quadriennales (article R. 743-1), assurer la formation continue obligatoire (articles L. 743-5, R. 742-39 et R. 742-40 du code de commerce) des greffiers des tribunaux de commerce, ainsi que, le cas échéant, la formation de leur personnel.

 

Il est également chargé de l’organisation du concours d’accès à la profession de greffier du tribunal de commerce et du suivi des stages (articles R. 742-6-1 à R. 742-15-1 du code de commerce).

Un officier ministériel

En sa qualité d’officier ministériel, le greffier prête son ministère aux particuliers pour l’exécution de certains actes ainsi qu’aux juges pour l’exercice de leurs pouvoirs.

 

Le conseil constitutionnel, le 26 mars 2015, a souligné que les greffiers des tribunaux de commerce exercent une profession réglementée dans un cadre libéral tout en participant à l’exercice du service public de la justice.

 

De cet exercice libéral de la profession découlent :

 

  • Une rémunération par le justiciable ou l’usager (émoluments) et non par l’État,
  • Un personnel relevant du secteur privé : les rapports employeur-employé sont régis par une convention collective, ce qui suppose, dans le respect de cette convention, une liberté d’embauche, de rémunération, de formation et de promotion,
  • L’investissement en matériel et moyens techniques sous la responsabilité exclusive du greffier et à sa charge.

 

Un officier public

Comme les notaires et les huissiers de justice, les greffiers des tribunaux de commerce sont en outre officiers publics.

 

En cette qualité, ils sont délégataires de la puissance publique de l’État et, au nom de ce dernier, ils confèrent l’authenticité aux actes de leur compétence.

 

Cette délégation de l’autorité de l’État suppose un contrôle rigoureux dans le cadre d’une réglementation stricte.

Conditions d’aptitude à l’exercice de la profession

Le candidat à la profession de greffier doit remplir différentes conditions générales d’aptitude définies par l’article R. 742 -1 du code de commerce.

 

Ainsi, nul ne peut avoir vocation à exercer la profession de greffier de tribunal de commerce s’il n’est pas de nationalité française ou ressortissant d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, s’il a fait l’objet d’une condamnation pénale pour des agissements contraires à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs, s’il a fait l’objet d’une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation,

révocation, mise à la retraite d’office, de retrait d’agrément ou d’autorisation, s’il a été frappé de faillite personnelle ou de l’interdiction professionnelle, s’il n’est titulaire, ou dispensé de l’être, du diplôme validant la première année de master en droit (du grade de master 2 à partir de 2025), d’un des titres ou diplômes reconnus équivalents pour l’exercice de la profession, s’il n’a été reçu au concours d’accès à la profession de greffier de tribunal de commerce prévu à l’article R. 742 -6-1 et validé le stage de formation à la profession de greffier de tribunal de commerce.

 

Nomination aux fonctions de greffier de tribunal de commerce

Un greffier peut être autorisé à exercer soit à titre individuel, soit dans le cadre d’une société, soit en qualité de greffier salarié.

 

Quel que soit le mode d’exercice, les dispositions du code de commerce relatives à la nomination prévoient l’information du ministère de la justice suivie d’une procédure d’appel à candidature.

 

En effet, le greffier qui souhaite exercer son droit de présentation pour céder son office doit, par téléprocédure, porter à la connaissance du ministre de la justice son projet ainsi que la valeur de l’indemnité demandée, correspondant à la valeur de l’office (art. R. 742-27-1).

 

De la même manière, tout projet de cession de titres de capital ou parts sociales d’une société titulaire d’un office devant donner lieu à la nomination d’un greffier de tribunal de commerce exerçant au sein de la société, ainsi que la valeur des titres ou parts à céder, doit être porté à la connaissance du ministre de la justice (art. R. 743-43-1).

 

Enfin, tout projet de recrutement d’un greffier salarié doit être porté à la connaissance du ministre de la justice dans les mêmes formes (art. R. 743 -139-5).

Un arrêté du ministre de la justice assure la publicité de l’annonce et fixe la date limite pour adresser sa candidature au greffier souhaitant céder son office, céder ses parts sociales ou recruter un greffier salarié. Le choix du candidat s’effectue dans les conditions mentionnées aux articles R. 742 -27-2, R. 743-44 et R. 743-139-5.

 

En toute hypothèse, la nomination doit, à peine de nullité, être suivie de la prestation de serment devant le tribunal dans le délai d’un mois. La formule du serment est la suivante :

 

“Je jure de loyalement remplir mes fonctions avec exactitude et probité et d’observer en tout, les devoirs qu’elles m’imposent.”

 

L’alinéa 2 de l’article L. 741-1 dispose que le greffier cesse ses fonctions de plein droit lorsqu’il atteint l’âge de soixante-dix ans.

 

Discipline

La déontologie et la discipline des greffiers sont régies par l’ordonnance n°2022 -544 du 13 avril 2022, le décret n°2022-900 du 17 juin 2022 applicables aux officiers ministériels et le décret n°2023-609 du 13 juillet 2023 relatif au code de déontologie des greffiers des tribunaux de commerce. Ces derniers textes ont abrogé les dispositions relatives à ces matières telles qu’elles étaient contenues dans le code de commerce

Elles sont de trois ordres :

 

  • Fonction d’assistance du tribunal (1),
  • Fonction de conservation des minutes et d’archivage (2),
  • Fonction d’authentification et de délivrance de copies (3)

 

L’assistance des juges (1)

L’article R. 741-1 du code de commerce dispose que « le greffier assiste les juges du tribunal de commerce à l’audience et dans tous les cas prévus par la loi.

 

Il assiste le président du tribunal de commerce dans l’ensemble des tâches administratives qui lui sont propres. Il assure son secrétariat ».

 

Selon l’expression consacrée, le greffier tient la plume et assiste le tribunal. Ensuite, le greffier met en forme les décisions prises et motivées par les juges.

 

Bien que n’étant pas magistrat, le greffier est une composante du tribunal, mais il n’a pas de fonction de décision juridictionnelle : il ne participe pas au délibéré.

 

L’article R. 741-2 indique que le greffier dirige, sous l’autorité du président, l’ensemble des services du greffe.

 

Il a, en outre, la mission (art. R. 741-1) :

 

  • D’assister le président du tribunal de commerce dans l’ensemble des tâches administratives qui lui sont propres. Il assure son secrétariat,
  • De l’assister dans l’établissement et l’application du règlement intérieur de la juridiction, dans l’organisation des rôles d’audience et la répartition des juges, dans la préparation du budget et la gestion des crédits alloués à la juridiction. Il procède au classement des archives du président.

 

Dans certains tribunaux, dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, le greffier affecte en permanence aux tâches ci-dessus un ou plusieurs agents du greffe. Ces personnes demeurent alors sous l’autorité fonctionnelle du président.

 

Le président peut requérir du greffier toutes prestations ou renseignements nécessaires à l’exercice de ses fonctions notamment en matière de prévention des difficultés des entreprises.

 

Il peut ainsi obtenir tous éléments publiés et centralisés au greffe : sûretés mobilières, comptes annuels, extraits d’immatriculation au RCS….

Il n’appartient cependant pas au greffier de suppléer la carence des parties dans la fourniture des pièces et des preuves.

 

Souvent, le greffier assiste plus particulièrement le président dans l’exercice de sa juridiction : ordonnances sur requête ou de référé, ordonnances d’injonction de payer…

 

S’il est placé sous l’autorité du président, le greffier n’est pas sous l’autorité des juges mais il leur apporte son concours.

En réalité, il a une fonction d’assistance permanente des juges : en matière de procédures collectives pour les juges-commissaires, de suivi des expertises, de surveillance du RCS, d’injonction de payer…

 

Le greffier et l’organisation du tribunal

Les assemblées générales du tribunal sont tenues sous la présidence du président avec l’assistance du greffier (art. R. 722 -2).

 

En outre, le greffier établit au début de chaque année un état de l’activité du tribunal avec les statistiques de l’année précédente. Cet état est adressé au ministre de la justice.

 

Même si leur mandat a été allongé, les juges consulaires exercent pour une durée plus ou moins longue. N’étant pas juges de profession, ils ont généralement une activité professionnelle parallèle et ne peuvent consacrer qu’une partie de leur temps au tribunal.

 

Le greffier peut leur faire bénéficier de son expérience et de sa pratique.

 

Juriste de formation, il peut leur apporter un appui juridique, notamment dans les tribunaux de petite ou moyenne importance où les juges n’ont pas toujours, à leur entrée en fonction, des connaissances approfondies en droit.

 

Le greffier et le ministère public

En vertu de l’article R. 741-2, le greffier dirige l’ensemble des services du greffe sous la surveillance du ministère public.

La surveillance du parquet peut s’exercer à tout moment, mais elle se manifeste régulièrement à l’occasion des inspections des greffes.

Le principe général de l’inspection des juridictions est posé par l’article R. 312-68 du code de l’organisation judiciaire. Le premier président de la cour d’appel et le procureur général procèdent à ces inspections.

Plus spécifique aux greffes des tribunaux de commerce, l’article L. 743 -1 du code de commerce prévoit le principe d’inspections au cours desquelles les greffiers sont tenus de fournir tous renseignements et documents utiles sans pouvoir opposer le secret professionnel.

 

L’inspection est conduite par le procureur de la République. Un ou plusieurs inspecteurs sont désignés pour chaque mission par le garde des sceaux parmi les greffiers de tribunaux de commerce en activité ou honoraires ayant cessé leur activité depuis moins de trois ans.

Les inspecteurs ont tout pouvoir d’investigation et de contrôle et peuvent se faire assister d’un expert-comptable ou d’un commissaire aux comptes (art. R. 743-1).

Le personnel du greffe inspecté doit répondre aux questions posées.

Les inspecteurs adressent un compte-rendu de leurs travaux au procureur qui le transmet au ministre de la justice. Copie de ce rapport d’inspection est communiquée au président du CNGTC et au président du tribunal de commerce lorsque l’inspection a été prescrite à la demande de ce dernier (art. R. 743 -4).

L’inspection a lieu au moins une fois tous les quatre ans, indépendamment des inspections occasionnelles.

 

L’inspection générale de la justice (IGJ) peut également, à la demande du garde des sceaux, ministre de la justice, procéder à des inspections occasionnelles inopinées portant sur l’ensemble de l’activité du greffier (art. R. 743-2).

 

La conservation des pièces et l’archivage (2)

Aux termes de l’article R. 741-2, le greffier du tribunal de commerce est dépositaire des minutes et archives dont il assure la conservation.

 

Sont conservés au greffe du tribunal sous la responsabilité du greffier :

 

  • Les originaux des jugements et ordonnances,
  • Les registres du répertoire général,
  • Les registres d’audience ou plumitifs,
  • Le dossier du tribunal qui comprend les indications du répertoire général, le nom des juges ayant à connaître de l’affaire, le nom des parties et des personnes qui les représentent ou les assistent, les actes, notes et documents relatifs à l’affaire (doivent y être mentionnés ou versés en copie les décisions prises, les avis et les lettres adressées par la juridiction, les prétentions des parties formulées par oral).

 

L’authenticité et la délivrance des copies  (3)
Authentification par le greffier

Jugements et ordonnances doivent être signés par le président et le greffier.

Seul est qualifié pour signer un jugement le greffier qui a assisté à son prononcé.

L’original de cette décision, acte authentique signé, constitue la minute dont le greffier est détenteur et dont il ne peut se dessaisir.

 

Un acte authentique est nécessairement dressé par un officier public (acte notarié pour les notaires, acte extrajudiciaire pour les huissiers, décision de justice pour les greffiers, acte administratif pour l’État).

Il fait foi, en vertu de l’article 1371 du code civil, jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté.

Au contraire, un acte dressé sans intervention d’un officier public est un acte sous seing privé (ou sous signatures privées).

Ne pouvant se dessaisir de la minute de l’acte, le greffier va établir des copies.

 

Délivrance des copies
Personnes habilitées à délivrer des copies :

Seul le greffier peut délivrer copie des pièces. Ce principe affirmé par l’article R. 741-2 est le corollaire de la responsabilité du dépôt des minutes et des archives qui lui incombe. De ce principe découle la conséquence que le tribunal et ses membres ne sont pas habilités à délivrer copies de leurs décisions.

 

Délégation – Assermentation :

Pour éviter un blocage de la juridiction, la loi du 10 décembre 1927 dans son article 1er dispose que le greffier “sera tenu de présenter aux juges et de faire admettre au serment un ou plusieurs commis âgés d’au moins 21 ans en nombre suffisant pour le remplacer en cas d’empêchement légitime, desquels il sera responsable”.

 

Les commis-greffiers exigés par le législateur prêtent serment devant le tribunal et sont habilités à remplacer le greffier aux audiences et à délivrer copie des actes du greffe. Ils sont indispensables dans les tribunaux importants comportant plusieurs chambres dont certaines siègent en même temps. Le commis-greffier assermenté n’agissant qu’en qualité de délégataire, le greffier reste pleinement responsable des faits et actes de son collaborateur habilité.

 

En conséquence, l’assermentation suppose non seulement une grande confiance mais une capacité propre de la personne à remplir cette tâche.

Les copies qui peuvent être délivrées sont de nature différente : copies authentiques ayant la force probante d’un acte authentique, copies simples.

 

C’est l’originalité du greffier du tribunal de commerce de n’avoir pas seulement des fonctions judiciaires, mais également des responsabilités importantes en dehors d’une procédure, ce sont ses attributions extra -judiciaires.

Les attributions extra-judiciaires du greffier peuvent être classées en deux fonctions principales :

 

  • L’une consiste en la collecte de l’information sur les commerçants et les sociétés commerciales et civiles, GIE et autres personnes assujetties par la tenue de registres (RCS, RSAC, RBE, RSM) et la conservation de différentes pièces,
  • L’autre, conséquence de la première, consiste à opérer la diffusion de cette information, par des modes traditionnels (extrait kbis, état des inscriptions, copie d’acte) ou modernes.

En savoir plus

 

À ces deux missions il conviendrait d’en ajouter une autre issue de la loi du 6 août 2015 et qui consiste à transmettre à l’institut national de la propriété industrielle (INPI) les données collectées pour en permettre la réutilisation. Ainsi, depuis la publication de cette loi, les informations recueillies par les greffiers ne le sont plus exclusivement aux fins de publicité légale, mais aussi aux fins de réutilisation commerciale par tous.